Ce module est une ressource pour les enseignants 

 

Circonstances aggravantes

 
Encadré 13

Article 6 Protocole contre le trafic illicite de migrants

(…)

3. Chaque État Partie adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère de circonstance aggravante des infractions établies conformément aux alinéas a, b i et c du paragraphe 1 du présent article et, sous réserve des concepts fondamentaux de son système juridique, des infractions établies conformément aux alinéas b et c du paragraphe 2 du présent article:

(a) Au fait de mettre en danger ou de risquer de mettre en danger la vie ou la sécurité des migrants concernés ; ou

(b) Au traitement inhumain ou dégradant de ces migrants, y compris pour l’exploitation. (…).

Conformément à l'article 6(3), du Protocole contre le trafic illicite de migrants, les circonstances suivantes doivent être considérées comme aggravantes et donner lieu à une peine plus lourde :

  • Circonstances qui mettent en danger ou sont susceptibles de mettre en danger la vie ou la sécurité des migrants concernés ;
  • Traitement inhumain ou dégradant, y compris à des fins d'exploitation, de ces migrants.

En ce qui concerne la première circonstance aggravante, les exemples de comportements qui mettent en danger ou sont susceptibles de mettre en danger la vie ou la sécurité des migrants sont notamment : i) les migrants transportés à bord de navires non navigables où il existe un risque important de mort par noyade, et ii) les conteneurs scellés (tels que les conteneurs maritimes et les camions) où il n'y a pas suffisamment d'oxygène ou les migrants sont exposés à des températures extrêmes. Il existe des exemples documentés de migrants faisant l’objet d’un trafic illicite abandonnés en mer, dans le désert ou dans des conditions glaciales, où leurs chances de survie sont limitées. Les États parties sont libres d'inclure des circonstances aggravantes supplémentaires dans leur législation. Bien que le Protocole contre le trafic illicite de migrants ne le demande pas, il pourrait être utile que les États envisagent d'étendre le champ d'application de cette disposition aux actes qui mettent en danger la vie ou la sécurité de tiers (plutôt qu'aux seuls migrants clandestins), tels que les agents publics ou les pêcheurs qui tentent de sauver les migrants en mer.

En ce qui concerne la deuxième circonstance aggravante, l'expression "traitement inhumain ou dégradant", bien qu'elle figure dans divers instruments internationaux (par exemple, La Déclaration universelle des droits de l'Homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques , Statut de Rome de la Cour pénale internationale), n'y est pas définie. Toutefois, la jurisprudence et les commentaires sont illustratifs à cet égard. Le traitement inhumain ou dégradant :

  • Peut-être à la fois physique et psychologique; 
  • Est différent de la torture parce qu'il ne présente pas les principales caractéristiques de cette dernière, à savoir être infligé par un agent de la fonction publique dans le but précis de recueillir des informations ou d'obtenir des aveux ;
  • Doit répondre à un certain niveau de gravité ; et
  • Peut inclure le traitement infligé à des fins d'exploitation (dans ce cas, il est important d'évaluer si le crime de traite des personnes a été commis - voir Module 11)..

Encadré 14

Le traitement est inhumain lorsqu’il est prémédité, appliqué pendant des heures et cause de réelles blessures ou bien des souffrances physiques et mentales intenses. Le traitement a été jugé dégradant parce qu’il est de nature à provoquer chez les victimes des sentiments de peur, d’angoisse et d’infériorité capables de les humilier et de les avilir .

ONUDC Loi type contre le trafic illicite de migrants, p.47

Les États ont souvent ajouté à la liste des circonstances aggravantes, les faits ou comportements suivants :

  • Commettre sciemment l'infraction en tant que membre, ou dans le cadre des activités d'un groupe criminel organisé ;
  • Causer la mort ou des blessures corporelles ou mentales graves en raison de la commission de l'infraction ;
  • Le fait de savoir ou d'avoir des raisons de croire que le sujet de l'infraction était ou devait être l'objet d'exploitation ;
  • Tirer parti de la situation de vulnérabilité du sujet de l'infraction ou d'une personne impliquée dans sa commission, telle qu'un handicap mental ou physique ;
  • Faire en sorte que le migrant faisant l'objet d'un trafic illicite, ou une autre personne impliquée dans la commission de l'infraction, prenne, inhale ou soit affecté par un stupéfiant, de l'alcool ou une autre substance intoxicante, afin de faciliter la commission de l'infraction ;
  • Utiliser un enfant comme complice ou participant à la commission du crime ;
  • Recourir à la tromperie ingénieuse ou à l'instrumentalisation des autorités publiques dans la commission de l'infraction (par exemple, instrumentalisation des autorités - voir ci-après "Compétence") ;
  • Commettre l'infraction ou aider à la commission de celle-ci, dans l'exercice ou la mise à profit des fonctions publiques ou de l'autorité de l'auteur de l'infraction.

Pour des exemples de dispositions sur le trafic illicite de migrants en provenance de différentes juridictions, voir SHERLOC Base de données sur la jurisprudence - Trafic illicite de migrants.

Deux autres exemples de circonstance aggravante comprennent :

  1. Le fait de commettre des infractions liées au trafic illicite de migrants en tant que membre, ou dans le cadre des activités d'un groupe criminel organisé

Comme on l'a vu plus haut, si la CTOC et le Protocole contre le trafic illicite des migrants mettent l'accent sur la criminalité organisée, l'appartenance à un groupe criminel organisé n'est pas un élément constitutif des infractions liées au trafic illicite de migrants. Souvent, elle constitue une circonstance aggravante. Il peut également s'agir d'une infraction distincte. L'expression "dans le cadre" vise à englober la contribution de personnes qui ne sont pas nécessairement membres d'un groupe criminel organisé. Les falsificateurs de documents, par exemple, travaillent souvent comme " prestataires " plutôt que comme une partie fixe du groupe de trafic illicite.

  1. Commettre des infractions liées aux trafic illicite de migrants dans l'exercice, ou en profitant de ses fonctions publiques ou de sa position d'autorité

L'abus de la fonction publique en tant que délit est généralement inscrit, d'une manière ou d'une autre, dans la législation nationale. Il peut également s'agir d'une circonstance aggravante dans la définition de certains crimes. En Égypte, par exemple, elle est spécifiquement inscrite comme circonstance aggravante des infractions liées aux Trafic illicite de migrants. En Australie, l'abus de fonctions publiques est une infraction pénale.

Il est utile de s'attaquer à ce problème en luttant contre la corruption liée au trafic illicite de migrants (par exemple, des agents de services frontaliers qui acceptent sciemment des documents frauduleux ou des agents d'ambassades qui délivrent des visas). Les agents publics qui, intentionnellement et sciemment, acceptent des documents frauduleux à des fins d'entrée ou de séjour dans le pays devraient être tenus responsables de l'infraction pénale de base. La conduite de personnes telles que des avocats, des médecins et du personnel de sécurité dans les aéroports pourrait également être étudiée. Un exemple typique serait celui des médecins qui délivrent des certificats médicaux frauduleux requis pour obtenir un permis de travail dans le pays de destination.

Encadré 15

Sentencia 31357 of 2010

En Février, Août et Octobre 2005, le défendeur a exercé les fonctions de Consul de la Colombie à Tulcán (Équateur). Une demande de visa, datée du 13 juillet 2005, signée par le défendeur, a été adressée au coordinateur des visas et de l'immigration du Ministère des Relations Extérieures de la Colombie. Par la même occasion, le défendeur a approuvé la demande du requérant (étranger chinois), s'assurant qu'il l'avait personnellement interrogé au Consulat de Colombie à Tulcán. Le défendeur a noté dans ses observations que l'interviewé présumé avait "manifesté son intention de rester légalement en Colombie, avec sa famille". Pourtant, il a été prouvé que cet individu n'avait jamais quitté son pays d'origine, la Chine (confirmation par les Services Administratifs de Sécurité (Departamento Administrativo de Seguridad)). Une procédure similaire, dans des circonstances similaires, a été suivie à l'égard d`une ressortissante étrangère chinoise. La demande de visa était datée du 15 septembre 2005. Cinq autres cas équivalents de facilitation de l'entrée et du séjour irrégulier de ressortissants chinois ont été recensés. Les documents délivrés par le défendeur ont informé l'autorisation délivrée ultérieurement par l'officier public chargé de la délivrance des visas au Ministère des Relations Extérieures de Colombie. Les sept ressortissants chinois sont entrés illégalement en Colombie en ne respectant pas les conditions légales fixées par la loi à cet effet.

[Le défendeur a été condamné, entre autres, pour trafic illicite de migrants]. En l'espèce, la peine applicable au trafic illicite de migrants (c'est-à-dire six à huit ans d'emprisonnement) [a été] alourdie en raison de l'existence de circonstances aggravantes prévues au paragraphe 4 de l'article 188B du Code pénal, à savoir la commission de l'infraction par un agent public.

SHERLOC Base de données sur la jurisprudence du trafic illicite de migrants - Colombie
 
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