29 Janvier 2018 - Dans la famille des Nations Unies, il est inhabituel de discuter de l'image d'une marque, de marketing et de points de vente. Pourtant, ces thèmes ont occupé une grande partie de la dernière rencontre du groupe d'experts organisée à Vienne la semaine dernière pour étudier de quelle manière l'ONUDC pourrait soutenir un schéma global de produits fabriqués dans des prisons, par des prisonniers, dans le cadre de programmes de réinsertion.
Une composante essentielle du Programme mondial pour la mise en œuvre de la Déclaration de Doha est le travail de l'ONUDC pour la réhabilitation des détenus, qui consolide la façon dont les programmes de réhabilitation dans les prisons peuvent être développés et harmonisés au niveau international. Depuis le lancement du Programme mondial, et en tant que gardien de l' ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (les règles Nelson Mandela), l'organisation a publié une Feuille de route pour le développement de programmes de réhabilitation en milieu carcéral. L'objectif est d'apporter des conseils pratiques pour l'amélioration des programmes de formation professionnelle et d'éducation pour les détenus, ainsi que des indications pour le suivi, l'évaluation et la supervision de ces programmes.
La réflexion sur une "marque mondiale des prisons," ou sur un schéma similaire pour promouvoir les marques existantes de produits fabriqués dans des prisons au niveau national, constitue la prochaine étape du programme. Cette réflexion a été le point central de la rencontre réunissant la semaine dernière des experts nationaux, des organisations de la société civile, du secteur privé et des organisations internationales.
Les délibérations à Vienne ont représenté la dimension globale des problèmes et des solutions possibles que rencontrent les États membres. Pour les administrations pénitentiaires qui développent déjà des programmes de formation professionnelle et de travail, les questions préoccupantes ne se limitent pas à former et fabriquer un certain nombre de produits dans une large gamme de secteurs (tels que l'artisanat, le mobilier, la mode ou même la nourriture). Dans la plupart des endroits, il est nécessaire de combattre les perceptions négatives qui entourent les prisonniers, et le stigma qui est attaché aux produits qui sont vendus avec cette appellation, afin que ces produits puissent trouver leur place sur le marché.
Bien que les prisons ne puissent pas fonctionner comme des entreprises du secteur privé, elles commencent néanmoins à penser au-delà des paramètres des normes d'incarcération traditionnelles, et à considérer ces programmes de réhabilitation comme de petites entreprises. "Notre mantra n'est pas la charité, simplement le travail. Nous ne devons plus avoir peur de nous qualifier d'entreprises," a déclaré Catherina Micolano, qui dirige l'initiative de mode Socially Made in Italy, une des études de cas présentées à Vienne, qui emploie des femmes détenues pour concevoir et fabriquer des produits pour des marques de mode de luxe, telles que Fendi.
D'autres cas, dans des pays aux circonstances et situations variées, ont été présentés comme exemples d'initiatives inspirantes. En Algérie, les détenus qui accomplissent avec succès des stages de formation et de travail reçoivent des certificats qui ne mentionnent pas qu'ils les ont reçus en prison, pour faciliter l'embauche après la libération. En Malaisie, des objectifs ambitieux définis avec l'industrie alimentaire ont été considérés comme accomplis, avec une stricte formation sur les normes d'hygiène et des contrôles établis pour la certification. Au Paraguay, les programmes de réhabilitation des détenus accompagnés de plans de marketing intenses ont permis de garantir sept points de vente pour divers produits fabriqués par des femmes dans les prisons.
Ces initiatives servent à diverses fins, au niveau social et pratique. Des programmes de travail adaptés pendant l'emprisonnement n'aident pas seulement à la réhabilitation des prisonniers, en les préparant à leur réinsertion dans la société une fois libérés, cela génère également des revenus pour ces prisonniers et cela leur permet de prendre soin de leurs familles, leur offrant un renfort psychologique puissant. Bien entendu, les programmes renforcent leurs capacités et leurs qualifications, et améliorent de manière significative leur potentiel d'embauche.
Avec tous les succès individuels et les opportunités prometteuses dans divers pays, de grandes difficultés persistent pour créer une marque mondiale ou un certificat, à la manière du logo Fairtrade. Néanmoins, la rencontre du groupe d'experts a permis de discuter en profondeur différentes manières par lesquelles l'ONUDC pourrait soutenir un processus de développement d'une marque mondiale, après que des options irréalisables fussent mises de côté suite à une étude de faisabilité approfondie. Les options réalisables incluent un programme de développement d'une marque selon lequel l'ONUDC ferait partenariat avec un organisme de vérification international déjà existant, ainsi que la création d'un site Internet promotionnel en partenariat avec une organisation internationale focalisée sur le commerce international - tout cela sera considéré dans la prochaine étape du programme, les avis et recommandations des experts seront pris en compte.
Deux conclusions sur lesquelles tous les participants se sont mis d'accord sont, premièrement, que l'objectif premier des programmes de travail dans les prisons doit rester de favoriser les perspectives de réinsertion sociale des prisonniers, conformément aux Règles Nelson Mandela - un objectif qui ne doit pas être subordonné au but de tirer profit des ateliers industriels dans les prisons. Deuxièmement, le champ de coopération doit s'étendre entre les organisations internationales et les corporations mondiales, sachant que ces dernières répondent de plus en plus à des dimensions sociales dans leurs activités. "Nous n'avons pas vu beaucoup d'engagement de la responsabilité sociale des entreprises dans le domaine de la réhabilitation et réinsertion sociale des prisonniers," a dit Dimitri Vlassis, de l'ONUDC. "Pouvons-nous changer cela? Je pense que nous le pouvons. Je pense que nous pouvons canaliser l'immense potentiel et l'enthousiasme que les entreprises investissent dans leurs programmes de résponsabilité sociale."
Le défi est lancé, et le travail de la composante axée sur la réhabilitation des détenus du Programme mondial de la Déclaration de Doha continue.
Additional information:
Manuel d'introduction pour la Prévention de la Récidive et la Réinsertion Sociale des Délinquants
Feuille de route pour le développement de programmes de réhabilitation en milieu carcéral